• Une dentelle ancienne : La Rosaline

     

    Dentelle aux Fuseaux – Fils coupés

    Caractéristiques : La Rosaline est une dentelle aux fuseaux belge du XIXème siècle, à fils coupés, toujours travaillée en fil grège (teinté dans le thé).

    Le nom de « Rosaline » est peut-être du simplement au petit motif en forme de Rose qui en est l’élément décoratif essentiel ; ou bien peut-être est-ce une appellation commerciale, les compositions de la Rosaline rappelant le point de Rose vénitien du XVIIème (Punto Rosaline en Italien), à une époque où les copies de dentelles anciennes étaient à la mode ?

    Technique : Les fils ne sont pas coupés après chaque motif, ils sont regroupés en une botte de fils tordue qui passe d’un motif à l’autre. Quand la dentelle est achevée, on coupe les bottes de fil au ras des motifs.


    Sur la photo de gauche, on voit la botte de fils qui a servi au démarrage du travail.

















    et sur la photo de droite, 
    on peut voir en haut le court passage de la botte de fils entre la tige et le coeur de la fleur
    (la photo est grossie : une fleur de Rosaline mesure moins de 2 cm de diamètre)




    La petite taille des éléments décoratifs donne toujours aux compositions de la Rosaline un aspect un peu confus. Elle fut utilisée pour les cols, les éventails, les manchettes, mais aussi pour de beaucoup plus grandes pièces comme des sets de table ou des nappes par exemple (voir note à la fin de l'article).





    Des tresses (*)  picotées relient entre eux des éléments décoratifs de petite taille et peu variés, parmi lesquels on trouve des volutes, 1 ou 2 sortes de feuilles et surtout cette fameuse petite "rose" à 5 pétales ajourés.

    Quand le cœurs de ces fleurs est orné d’un petit anneau à l’aiguille comme sur cette photo, on parle de « Rosaline perlée ».


    (*) En Belgique on parle de "tresse" pour désigner ce qu'on appelle "corde" en France.





    Les motifs sont pratiquement tous travaillés en toilé (= mat), avec quelques ajours. Le bord du toilé est épinglé après 2.

    Il n’y a pas de cordonnet mais un lacet contour permet de donner du relief, notamment sur le motif ci contre appelé « le poisson ».

    Sur les dentelles de moindre qualité, le lacet contour était remplacé par une botte de fils nouée .

    Sur cette photo, on voit que le "poisson" de gauche est travaillé en lacet,  alors que la botte de fils nouée est bien visible sur les deux autres "poissons" (le haut étant malgré tout travaillé en lacet) 









    Certains motifs sont ornés d’un fond le plus souvent en épingle close qui pouvait être fait à l’aiguille ou aux fuseaux ;
    On reconnaîtra un fond aux fuseaux à la série de nœuds d’arrêt que l’on ne retrouve pas dans le travail à l’aiguille.








     

    Histoire : Au milieu du XIXèmesiècle, concurrencées par la mécanique, les dentellières de Bruxelles, Bruges, Gand, mettent au point différentes techniques de dentelles fleuries à fils coupés, inspirées des prestigieuses dentelles de Bruxelles du XVIIIème. mais plus "grossières" et rapides à faire.


    Parmi ces nouvelles réalisations, on distinguera la Duchesse brugeoise, le gros fleuri de Bruges et enfin, vers la fin du XIXèmesiècle, la Rosaline qui sera surtout travaillée dans la région d'Alost, de 1890 à 1955 environ.

    Si la Rosaline est une "spécialité" d'Alost, elle a aussi été travaillée dans d'autres villes Belges, et certains petits détails permettent de deviner leur origine.





    Les motifs d’animaux , comme ce charmant petit écureuil, sont inconnus dans la région l’Alost, mais très courants dans la Rosaline plate de la région de Gand ou de Bruges












    Dans la région de Gand et de Bruges, on travaillait la Rosaline un peu à la façon du Rococo ou du fleuri de Bruges : pas de lacet contour en relief, pas de perles à l’aiguille (on parle de « Rosaline plate »), les feuilles étaient travaillées de haut en bas ; dans les fleurs, on alternait les pétales en toilé et en grillé comme dans le fleuri de Bruges.
    La photo qui suit est un bel exemple de ce genre de travail.



    Note : Sachant que chaque petite fleur fait moins de 2cm de diamètre, on se dit qu'il devait falloir des mois ou des années pour faire une nappe !
    Et bien non, pas du tout, il ne fallait pas beaucoup plus de temps pour faire une nappe que pour faire un petit col par exemple ... il fallait seulement plus de dentellières.

    La riche cliente qui venait commander une nappe la voulait très vite, elle n'était pas prête à attendre plusieurs mois.
    Alors le marchand "découpait" le carton en petits morceaux et chaque ouvrière dentellière avait un petit bout du carton, qui correspondait à une semaine de travail.
    La dentellière ne savait même pas si ce morceau était destiné à un col, un napperon ou une nappe.
    Tous ces petits morceaux étaient ensuite cousus entre eux dans les ateliers du marchand.
    Même la dentelle au mètre était faite ainsi, par petits tronçons.

    Une pièce de Rosaline était donc faite par plusieurs dentellières, et si vous regardez de près, vous pourrez facilement voir des différences dans le travail qui pouvait être plus ou moins soigné selon les dentellières.
    Ainsi par exemple on trouvera des endroits ou les tresses seront picotées, et d'autres endroits ou la dentellière, plus pressée on moins attentionnée, aura omis de faire les picots. 



    Sur la technique de la Rosaline, je ne connais pas d'autre livre que celui de Ghislaine Eemmans-Moors ... mais qui est hélas épuisé.
    Titre: Rosaline Lace - Auteur  : Ghislaine Eemans-Moors - Editeur : Batsford.
    Ce livre est en plusieurs langues, dont le français.


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