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Par dentelle et papillon le 23 Juillet 2011 à 10:15
Quel était le secret du vieux carreau ?
quel était l'indice ?
Et bien c'était cette mention sur le carton :
La Boule de Neige
Ce carton correspond en tous points à la publicité qui en était faite :
"Tous les cartons de la "Boule de Neige" sont piqués et bien dessinés sur carton vert foncé, portent un numéro d'ordre, l'indication du nombre de fuseaux et le numéro de fil à employer "
Oui, et alors ?
Et bien Boule de Neige = Tjevoli
Fuseaux Tjevoli
Je me suis dit alors que les fuseaux jugés "ordinaires" étaient peut-être des Tjevoli ....quel curieux nom n'est-ce pas ?
ça ne vous dit toujours rien ?
Alors je vais vous raconter une histoire
Il était une fois, fin XIXème-début XXème, un joli magasin d'ouvrage de dames situé dans la ville du Mans .
Il s'appelait la Boule de Neige
et était tenu par un couple qui y vendait tout le matériel nécessaire à la confection de la dentelle aux fuseaux :
carreaux, fils, fuseaux, épingles, etc.
Ils avaient même publié une méthode d'apprentissage de la dentelle, méthode qui fut déclinée sous diverses formes
et plusieurs fois republiée.
Madame était une dentellière experte :
en 1899 elle avait obtenu une médaille de vermeil pour sa dentelle lors d'un exposition nationale qui avait eu lieu au Mans.
Tout en tenant la boutique, elle donnait des cours de dentelle mais aussi de broderie ou de tapisserie.C'est aussi elle qui dessinait les cartons.
Voyant sa femme et ses élèves embobiner et rembobiner sans cesse du fil sur leurs fuseaux, Monsieur eu une idée : faire des petits cônes de fils qu'il suffirait d'enfiler sur le fuseau.
Pour pouvoir enfiler ce petit cône de fil, il fallait des fuseaux spéciaux
et bien les voici !
oui, je sais, à première vue, rien de bien particulier sur cette image.
Le premier est embobiné de façon tout à fait ordinaire
le deuxième, vide, est vraiment d'une banalité sans nom
et sur le troisième ...
et bien il n'y a plus de fil, mais il reste un morceau de carton
C'était le carton qui servait d'armature au cône de fil.
Alors, pour pouvoir recharger le fuseau, il fallait juste ....
enlever la tête.
.
En 1903, Monsieur dépose même un brevet pour son fuseau à tête amovible.
Il en faisait en buis, en palissandre, et même en os.
.
Encore fallait-il qu'il trouve un nom à ses fuseaux
et pourquoi pas une anagramme ?
Anagramme de quoi ?
ha oui, j'ai oublié de vous dire que le couple qui tenait cette jolie boutique du Mans s'appelait
Monsieur et Madame Jolivet.
ce qui a donné ....Tjevoli
Comme pour les tout aussi célèbres fuseaux Cottier, les Tjevoli avaient pour but d'éviter le fastidieux travail d'embobinage, et de protéger le fil grâce à l'étiquette qui recouvrait tous les petits cônes.
Mais aussi, comme les fuseaux Cottier... et les machines à café nespresso,
cette invention avait l'avantage de fidéliser la clientèle obligée de venir acheter ses recharges chez le fournisseur,
recharges qu'on pouvait donc vendre plus chères .
.
C'est sans doute pour cela que leur succès fut éphémère, what else ?
(enfin .... pour nespresso, on sait pas encore )
Contrairement aux fuseaux Cottier, on pouvait continuer à se servir des Tjevoli même sans les petits cônes amovibles
on pouvait embobiner le fil dessus de façon traditionnelle
(comme on le voit sur le tout premier fuseau),
Mais hélas, c'est aussi cette deuxième vie possible des fuseaux Tjevoli qui fait qu'ils passent souvent inaperçus .
Combien de dentellières voyant la tête se détacheront cru que leur fuseau était cassé et l'ont jeté ?... ou collé !!!!!!Le rêve de toute dentellière (moi la première) est de trouver un jour
des fuseaux Tjevoli avec leur bobine de fil
Dentellecigale a eu cette chance : ICI
en cliquant sur Papillon, vous pourrez lire la notice des fuseaux Tjevoli,
ainsi que le début des explication du modèles figurant sur le carton
.... explications de l'époque .
Maintenant, un mystère demeure : Le carreau qui accompagne les fuseaux est-il un de ceux vendus par la boutique du Mans ?
Je l'ignore
Il y ressemble,
Il a les dimensions des modèles vendus sous les numéros 1 ou 2
Ils pouvaient être recouverts de toile cirée, ou de peluche (?)
si quelqu'un sait comment les reconnaître, je suis preneuse.
Un grand bravo à celles qui avaient trouvé le lien entre la Boule de Neige et les Tjevoli
Enfin vous vous demandez peut-être si ma cousine a réussi à vendre son carreau ?
oui .... à moi
Un grand merci à B.et H. J. qui, les premiers, m'ont raconté cette histoire.
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Par dentelle et papillon le 16 Juillet 2011 à 14:15
Il y a quelques temps, ma cousine m'apporte un veiux carreau dans une boîte.
Elle l'a chiné il y a de nombreuses années et il l'encombre.
Charge à moi de voir à combien on pourrait le vendre sur internet
J'ouvre la boîte et ... et ....
bof
petite déception
C'est vrai que mon rêve aurait été d'y trouver un "vrai" ancien carreau du Puy,
bien patiné par les ans,
avec sa toile cirée moche et usée par le jeu des fuseaux,
et surtout ses images pieuses sur les côtés.
Là, c'est un petit carreau
tout a fait charmant et frais,
mais un peu passe-partout,
et qui n'a sans doute pas souvent été utilisé.
des fuseaux du Puy aussi,
tout ce qu'il y a de plus classique.
un carton avec un dentelle torchon basique tout à fait ordinaire
et une petite photo de l'arrière pour terminer.
et pourtant ..... pourtant .....
un petit détail a attiré mon attention
et j'ai commencé à me faire tout un petit roman dans ma tête
Alors ... les expertes et les experts lecteurs de ce blog
qu'y a-t-il de "remarquable" sur ce carreau ?
je vous laisse chercher un p'tit peu, d'accord ?
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Par dentelle et papillon le 11 Février 2011 à 17:30
Là, vous voyez le Musée Guimet à Paris
... arrangé à ma façon
Mais en fait, je vais vous parler ... lessive !
Que faisait-on au XIXème siècle pour avoir du linge plus blanc que blanc ?
Et bien on le passait au bleu
on l'azurait.
C'est à dire qu'on le plongeait dans une eau dans laquelle on faisait dissoudre
au préalable un peu de pigment bleu .
Ce fut d'abord du pastel , très cher,
qui fut remplacé par l'indigo, moins onéreux car importé d'Amérique où il était cultivé par les esclaves.
Tout l'art était dans le dosage : il fallait bleuir légèrement le linge pour que, par effet d'optique, il paraisse plus blanc.
Mais pas trop, car trop d'indigo dans cette eau pouvait au contraire le teindre en bleu
On achetait le bleu en poudre, en boules, en plaquettes, en pastilles, etc.
Dans tous les cas, il fallait le mettre dans un petit sac de mousseline que l'on agitait et pressait dans l'eau pour en extraire le colorant.
Le sac en mousseline était indispensable pour qu'aucun petit morceau ne puisse s'échapper, menaçant de tacher le linge.
Il fallait replonger de temps en temps le petit sachet dans l'eau pour rajouter du bleu au fur et à mesure que le linge qu'on y trempait absorbait la couleur.
D'autant que certains linges étaient plus gourmands que d'autres :
"le linge neuf et celui de coton retiennent beaucoup plus de bleu
que le vieux linge et celui de fil" (*)
Il fallait aussi veiller à bien essorer le linge et l'étendre aussitôt pour éviter une accumulation d'eau dans les plis qui pouvait laisser des traînées bleues en séchant.
C'est bien joli tout ça, mais quel rapport avec le musée Guimet ?
Et bien il y a un homme qui fit fortune avec ce bleu qu'on trempait dans l'eau de rinçage,
ce fût Jean-Baptiste Guimet
Il découvrit en 1826 l'outremer artificiel, et mit ainsi sur le marché un bleu beaucoup moins onéreux que ceux utilisés jusque là.
Ce fut l'invasion du Bleu Guimet
Jean-Baptiste eut un fils, Emile.
Grâce à la fortune de papa, Emile fit de très nombreux et lointains voyages,
en Egypte, en Grèce, en Inde, au Japon, en Chine, dans tous les pays d'Asie ....
Pour présenter au public la magnifique collection d'objets qu'il rapporta de ses voyages, il créa en 1879 un premier Musée Guimet à Lyon,
puis il déménagea sa collection dans un autre Musée qu'il fit construire dans la capitale : l'actuel et célébrissime Musée Guimet de Paris.
Emile Guimet ne se contenta pas de jouer au collectionneur, il reprit l'usine de son père à Fleurieu sur Saône dans la banlieue de Lyon.
En 1878, cette usine employait eviron 150 ouvriers et produisait 100 tonnes de bleu !
Et voilà pourquoi j'ai peint le Musée Guimet en bleu
pour qu'on n'oublie pas que cette magnifique collection d'art asiatique doit son existence à toutes les petites ménagères et blanchisseuses qui azuraient leur linge avant de l'étendre dans les prés pour le faire sécher.
(*) Millet robinet : La Maison rustique des dames, Paris 1888
Pour m'aider à rédiger ce petit billet, j'ai eu recours à :
La Blanc, une invention choletaise - Elisabeth Loir-Mongazon - Musée du textile de Cholet
Dans les armoires de nos grands-mères - Inès Heugel et christian Sarramon - Editions du Chêne
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Par dentelle et papillon le 24 Décembre 2010 à 07:00
Un très Joyeux Noël à toutes et tous
et à ceux que vous aimez
et à vos 4 pattes aussi bien sûr
Chat et Papillon attendent avec impatience de voir si le Père Noël va exaucer leur souhait :
Chat a commandé une boîte de sardines à l'huile, et Papillon un mini fromage..
Si vous n'avez pas de petit ange pour décorer votre sapin, comme sur cette carte postale ancienne,
je vous propose quelques décorations à réaliser vous mêmes avec des coquilles de noix et des fils de soie.
Devinez où j'ai trouvé ces petites merveilles ?
Dans ma revue favorite :
La Mode Illustrée bien sûr
Fermez les yeux , et imaginez que vous êtes
en décembre 1879
Qu'allez vous faire ?
Cette simple noix vernie, entourée d'un ruban de satin rouge disposé en noeuds
Ou bien cette petite corbeille garnie de broderies au point russe en soie bleue
?
Les plus courageuses pourront essayer de réaliser ces deux ravissantes suspensions.
Elles sont ornées de filet et de glands, en laines et soies de couleurs vives.
Sur la première, c'est une noisette évidée que vous voyez en haut, et qui tient les pompons
et celles atteintes de folie douce
devront se procurer la noix la plus grosse possible pour réaliser ceci
...
Une simple noix ornée de dentelle.
Simple ... quand elle est fermée.
Car une fois ouverte, on découvre le petit berceau qu'on aura confectionné pour une poupée microscopique.
Et dans la coquille du haut ?
le trousseau de la poupée bien sûr !!!!
ben tiens ....
y a plus qu'à ...
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Par dentelle et papillon le 3 Octobre 2010 à 15:24
Dimanche d'automne triste et pluvieux ...
et si on s'offrait un petit bol de chicorée pour se réchauffer ?
Vous faites la grimace ?
c'est que vous n'avez pas encore vu la chicorée que j'allais vous offrir
Tadaaaaaam
La voici, la voilà
Avouez que vous tombez vous aussi sous le charme de cette chicorée
J'ai acheté cette jolie étiquette il y a peu de temps,
avec une vague impression de "déjà vu"
oui, cette dentellière, je la connais
ce carreau ... ces fuseaux ......
pourquoi ai-je l'impression de voir une dentellière normande ?
alors je fouille dans mes vieilles cartes,
et voilà,
je la retrouve ma belle dentellière normande.
Regardez,
c'est la même posture, la même position de la main,
le même châle imprimé sur l'épaule ,
et puis bien sûr le même carreau, les mêmes 4 paquets de fuseaux !
Je ne peux m'empêcher de penser que le dessinateur avait cette carte postale sous les yeux,
il a juste un peu embelli l'encolure et rajouté une coiffe en pyramide sur la tête (existe-t-il des coiffes du Nord de cette forme ?)
C'est quand même un comble !
Dans le Nord,
une région si riche en tradition dentellière,
aller chercher l'image d'une dentellière normande !
faut l'faire
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