• Oui, évidemment, si je vous montre cette dentelle et que le titre du billet et "Dentelle de Beveren", vous vous dites que ça doit être ... une dentelle de Beveren.

    Hé hé, ça prouve que vous n'êtes pas bêtes ! 



    Maintenant, je vous prête mon compte fil pour que vous puissiez voir le détail, notamment le réseau,

    Ce fond à mailles hexagonales constituées de croisement de deux pairesqui sont ensuite tordues 3 fois, vous l'avez déjà vu dans  un article précédent ( ici) et je vous avais dit que ce fond était celui de la dentelle  ...  de Lille.

    Ah ben alors ????       faut savoir !!!!!     Lille ou Beveren  ? 



    En fait j'aurais dû dire que c'est le fond des dentelles genre Lille.
    C'est ce qu'on appelle le "fond clair" qu'on retrouve dans plusieurs autres dentelles.




    En effet, la dentelle de Lille a essaimé un peu partout en Europe, donnant naissance à la  Bucks en Angleterre, la Tonder au Danemark, la Beveren en Belgique .... et d'autres.

    Chacune de ces filles de la dentelle de Lille a développé ses petites particularités aussi bien au niveau des motifs que de la technique.


    On retrouve dans la Beveren plusieurs points caractéristiques des dentelles à fond clair en général :

    La maille hexagonale du fond clair bien sûr.
    Un semé de petits points d'esprit carrés dans le fond (sur les dentelles de Beveren, les points d'esprits sont disposés de façon régulière sur toute la hauteur de la dentelle).
    Les motifs en mat, cernés d'un cordon plus gros que le fil de la dentelle. Vous remarquerez que dans la Beveren, on retrouve aussi le cordon autour des ajours au milieu des mats  .
    L'utilisation de quelques points fantaisie. Surtout le "fond vitré" (= fond à la rose) que vous voyez dans le coeur et les pétales des grosses fleurs sur la première photo.


    Mais il y a trois choses qui différencient bien la Beveren de ses soeurs :
    Tout d'abord, le motif : une répétition de gros bouquets qui occupent toute la hauteur de la dentelle.
    Il faut bien avouer que la plupart du temps la composition est assez sommaire et assez lourde , mais, comme vous le verrez plus bas, ces motifs sont finalement très décoratifs et très bien adaptés à l'usage qui en était fait.

    Vous verrez aussi pratiquement tout le temps un motif de "plume" .
    Il s'agit plutôt d'une feuille très allongée et qui est souvent décorée d'une ou deux rangées d'ajours.
    Le deuxième élément très reconnaissable est le bord droit et picoté (indiqué par une flèche rouge sur la photo en gros plan) : il est constitué d'un petit mat étroit avec un cordon de chaque côté.
    enfin,  si vous prenez votre compte fil, vous découvrirez le "secret", le petit détail technique qui vous dénonce une Beveren à coup sûr :  les poses d'épingles ne sont pas à l'intérieur du motif comme pour les autres dentelles de la même famille, mais à l'extérieur.

    Sur  le gros plan, j'ai marqué la place de quelques épingles avec un point orange.
    On voit qu'à chaque liaison, à chaque entrée ou sortie de paire, les voyageurs sortent du motif, pour y revenir après avoir été maintenus par l'épingle.
    Ces petites bouclettes en bordure extérieure des motifs sont vraiment très particulières à la Beveren.




    Les dentelles de Beveren sont souvent des dentelles larges, en fil plutôt gros pour du fond clair.

    Mais on peut en trouver aussi de beaucoup plus fines comme sur cette photo.













    La plupart des dentelles de Beveren étaient vendues en Hollande pour border les bords des coiffes, au point qu'on appelait souvent cette dentelle  "Dutsche slag" = Point de Hollande.

    Avant de travailler le fond clair, les dentellières de la région d'Anvers (dont Beveren) faisaient déjà des dentelles pour les coiffes hollandaises, des dentelles parfois appelées "Pottekant" à cause de leur motif récurrent de vase fleuri.
    Ce sont ces mêmes bouquets qui seront réalisés sur fond clair vers 1820-1830, avec cependant une petite évolution : en effet, les motifs de la Beveren vont aussi beaucoup s'inspirer des impressions cachemire très à la mode à cette époque.

    Comme je le disais, quand on regarde la Beveren hors de son contexte, on a tendance à voir une large dentelle, en fil assez gros,  aux motifs plutôt lourds.

    Mais avouez qu'en fait, elle est merveilleusement adaptée au bord de cette coiffe hollandaise.
     Elle devient somptueuse quand elle est dans son élément, non ?.



     




    Et pour celles qui ont posé une question sur le picot : le voici !!!!!!!   




  • La dentelle de Valenciennes a tellement de visages différents, son histoire est si riche, qu'il faudra plus d'un chapitre pour en parler.
    C'est la dentelle aux fuseaux classique par excellence, connue pour sa finesse extraordinaire, sa légèreté, sa pureté, la grâce et l'élégance de  ses motifs, le contraste entre des mats très denses et un réseau léger,  la richesses des points décoratifs du début XVIIIème .

    Les Valenciennes les plus anciennes sont un peu délicates à reconnaître parfois.

    Par contre les Valenciennes tardives, surtout celles du XIXème et XXème sont très facilement identifiables.
    Ce sont elles que nous allons observer dans un premier temps, ces Valenciennes que vous trouverez facilement en brocante, au bord des mouchoirs de mariées, sur les coiffes, sur les robes de baptême, etc...


    Les caractéristique de la Valenciennes XIXème - XXème

    -1-  La Valenciennes est une dentelle aux fuseaux à fils continus (ou semi continus).

    -2-  C'est une dentelle fine, voire très fine, même si les dentelles commerciales tardives du XIXème pouvaient être un peu plus grossières.

    -3-  Le critère de reconnaissance le plus évident est le réseau.
    Si vous le regardez de près, à l'aide d'un compte fil, vous verrez qu'il est entièrement constitué de tresses de 4 fils (cf l'article précédent qui permet de comparer le fond Valenciennes avec des fonds similaires ici)

    -4- Les motifs sont très majoriairement travaillé en mat, avec parfois un peu de grille mais c'est peu courant.

    -5- Il n'y a jamais de cordon (gros fil) au bord des motifs.

    -6- Par contre, le motif est entièrement entouré d'une ceinture , c'est à dire d'une une paire travaillée en passées tordues.
    Sur la photo de droite (fort grossissement), j'ai mis des petits points orange sur le trajet de la ceinture afin de mieux la visualiser.

    -7- Des motifs très gracieux et légers de feuilles et de fleurs naturelles ou plus sophistiquées selon les époques, de rubans, très rarement d'animaux

    -8- Très peu de fonds décoratifs fantaisie sur les Valenciennes tardives.




    Les mailles du réseau peuvent vous paraître rondes (comme sur la première photo en haut de l'article) ou nettement carrées comme sur l'exemple ci dessous : ne soyez pas surprises, la forme de la maille peut effectivement varier selon la façon dont elle est travaillée.
    Les mailles de la Valenciennes furent d'abord rondes (ou plus exactement hexagonales) et devinrent plus carrées à partir de 1740 environ.
    (vous remarquerez sur la dentelle ci dessous un joli exemple d'utilisation de la grille dans les feuilles)



    Dentelle à fils continus  ou semi continus : pourquoi ?

    Le réseau des Valenciennes XVIIIè était très serré, il nécessitait donc beaucoup de fuseaux et permettait d'avoir des mats très denses, mais il limitait la largeur des dentelles.
    Petit à petit, on chercha à accentuer le contraste mat/réseau , et pour rendre ce dernier plus léger, on chercha à agrandir le plus possible les mailles.
    Le fond carré  se prêtait bien à cet artifice et il s'est généralisé.

    Un réseau plus aéré voulait dire aussi moins de fuseaux, dentelle plus rapide à faire (appréciable face à la concurrence de la mécanique) , possibilité de faire des dentelles plus larges, mais il y avait un revers à la médaille.
    En effet, avec un réseau très large, il n'y avait plus assez de fuseaux pour obtenir les mats denses et serrés si caractéristiques.

    On eu l'idée alors vers 1830 de  rajouter des paires au début de chaque motif, et de les couper au ras de la dentelle dès le motif terminé.
    La dentelle de Valenciennes est alors devenue une dentelle dite "à fils semi continus", et dans pratiquement toutes les dentelles du XIXème, vous verrez facilement, grâce au compte fil, les petites touffes de fils rajoutés .

    Sur la photo aggrandie qui montre la ceinture, les petites flèches noires vous indiquent les bottes de fils coupés au ras de la dentelle au début et à la fin du motif.




    J'ai essayé de choisir des photos vous montrant la diversité des Valenciennes que vous pouvez trouver, même tardives.
    La première photo de l'article vous montre une dentelle plus ancienne, fine, à maille ronde, avec un tout petit motif très léger.
    Le réseau est beaucoup plus large sur la dentelle aux feuilles en mat et grille.
    Ci dessous, vous avez une petite dentelle très courante comme on en utilisait beaucoup au bord des coiffes, de la lingerie, des vêtements de bébés, etc.


    On peut trouver aussi, mais plus rarement, des Valenciennes beaucoup plus larges comme celle qui suit




    Avec son fond  de tresses, et ses motifs très denses, la Valenciennes avait une réputation (non usurpée) de dentelles très solide : on parlait de l "éternelle Valenciennes"

    Ce fut une des dentelles les plus prestigieuses : il faut savoir qu'il était obligatoire de porter de la Valenciennes l'été à la cour de France, au même titre que le port des dentelles à l'aiguille (Alençon) était obligatoire ... l'hiver.

  • (haut = 12cm)


    Que voit-on sur cette photo  ?

    Une dentelle en soie blonde (plus rarement noire)
    Attention, "soie" ne veut pas dire obligatoirement "brillant" : pour pouvoir être travaillé, pour avoir une dentelle solide, le fil de soie doit être suffisamment tordu, et plus la soie est tordue, moins elle est brillante.

    Beaucoup ....   beaucoup .... mais alors beaucoup  de points d'esprit (*)
    Souvent même des fonds entiers composés de points d'esprit !

    Et, des motifs de Croix de Malte

    Voilà, nous avons les 3 ingrédients principaux de la dentelle de Malte, une des plus facile à identifier.






    Les motifs sont le plus souvent en mat (mais la grille est aussi utilisée)

    La dentelle de Malte est travaillée par bandes, ou par motifs isolés qui sont ensuite cousus ensemble de façon pratiquement invisible (invisible sur les dentelles anciennes  ou de qualité .... les dentelles actuelles pour touristes étant beaucoup plus contestables).

    Sur la photo ci contre, vous voyez la croix de Malte, bien sûr, un fond de points d'esprit, et aussi un motif de rose que l'on retrouve assez régulièrement.

    Entre la bande avec les roses et le fond de points d'esprits, on devine une couture qui montre que ces deux parties on été travaillées séparément.

    Cette photo fait partie d'une très large dentelle (haut 43cm) sans doute faite pour une aube, dont vous avez pu voir un autre détail dans l'article Les animaux et la dentelle .
    Sur la photo de l'article précité,  le rond avec une sorte de palmier en points d'esprit a été travaillé à part, puis cousu au reste.


















    En plus des fonds à base de points d'esprit, le fond de Paris (dit aussi fond Trenne ou fond Chant)  est souvent utilisé (photo de gauche).

    Les motifs peuvent aussi être tout simplement reliées entre eux par des tresses (généralement sans picots) ou des paires tordues.

    Sur la photo de gauche, j'ai indiqué par des petits traits en bleu les endroits où les différentes parties de la dentelle on été assemblées entre elles.








    Grands amateurs de dentelles (comme en témoignent leurs portraits), ce sont les chevaliers de l'Ordre de Malte qui ont introduit la fabrication de la dentelle sur l'île.
    Les dentellières de Malte ont sans doute travaillé successivement plusieurs types de dentelles, selon les modes et les époques, jusqu'à ce que vers 1830, Lady Hamilton Chichester leur demande de s'inspirer des dessins de  la dentelle de Gênes du XVIIème siècle (la même dentelle qui inspira le CLuny).
    Ce sont ces motifs de Gênes, à base de rosaces et de points d'esprit,  que les dentellières et dessinateurs locaux vont adapter pour arriver à la dentelle de Malte que l'on connaît aujourd'hui.

    Cette dentelle de Malte a eu beaucoup de succès au XIXème siècle, et a été imitée dans de nombreux pays, dont l'Espagne, la France, et en Angleterre où elle fut à l'origine de la Bedfordshire (qui s'est d'ailleurs d'abord appelée Bedfordhire Maltese).



    Les dentellières de Malte (et de l'ile de Gozo) travaillent  sur des metiers longs et étroits, recouverts de papier , qu'elles appuient sur le dossier d'une chaise, ou même sur un mur  (tournant ainsi le dos à la rue, ou à la pièce dans laquelle elles travaillent) .









    (*) pour les non dentellières :  les points d'esprit, ce sont ces motifs en forme de petites feuilles plus ou moins allongées.
    Sur la première photo en haut de l'article, des petits points d'esprits courts  forment une bande de petite croix en haut de la dentelle. En haut et en bas de la croix de Malte, vous voyez des points d'esprits plus allongés qui forment une marguerite.

    Ce point est réputé assez difficile à faire, et c'est en quelque sorte un "rite initiatique" pour les dentellière débutantes.
    Les premiers points d'esprit d'une dentellière sont en général un grand moment de réjouissance pour son groupe  : c'est souvent l'occasion d'un bon fou rire général des aînées, amusées et attendries par le regard dépité de la débutante devant ses points d'esprit dont la forme rappelle plus le haricot vert rachitique que la feuille bien ventrue .


    Voici  quelques liens pour voir de la dentelle et des dentellières de Malte :
    ici des dentelles
    ici des dentellières, cliquez sur Next pour faire défiler les photos
    ici la vidéo d'une dentellière au travail. Vous regarderez bien le fond de la dentelle qu'elle est en train de faire, il s'agit d'un autre fond qu'on rencontre assez souvent dans la dentelle de Malte, dit le "fond anglais".
    ici photos d'une expo à Bruges




    Les livres consacrées à la dentelle de Malte sont plutôt rares : 

    "Gozo Lace. an introduction to Lace Making in the Maltese Islands", par Consiglia Azzopardi, la grande spécialiste actuelle de la dentelle de Malte. Livre d'initiation à cette dentelle, avec beaucoup d'échantillons et quelques modèles à réaliser. En anglais.
    Consiglia Azzopardi a aussi écrit un livre sur les dessins de Dun Guzepp Diacono. Dans ce livre, vous trouverez de nombreux modèles, mais aucune explication. A réserver donc aux dentellières expérimentées (titre : "Gozo Lace A selection of bobbin lace patterns designed by Dun Guzzepp Diacono", en anglais)

    Dans le très beau livre "Guipure und Cluny Spitzen"  du Deutscher Klöppelverband, vous avez deux articles sur la dentelle de Malte . Je ne sais pas s'ils sont intéressants ... je ne comprenant pas l'Allemand, mais il y a quelques belles photos ainsi que 2 ou 3 modèles bien expliqués.





  • Je ne suis pas du tout une spécialiste des coiffes, je ne sais pas reconnaître leur région, leur époque , mais je sais reconnaître leurs dentelles.
    Inversement, de  nombreuses spécialistes et collectionneuses savent tout des coiffes, mais ne savent pas du tout reconnaître les dentelles qui les ornent.

    Je vous propose une petite méthode de reconnaissance des 3 dentelles qu'on retrouve le plus fréquemment sur les coiffes traditionnelles : La dentelle de Lille, celle de Malines et, un peu plus rare, celle de  Valenciennes.

    Voici trois exemples de petites dentelles qui pouvaient servir à border les coiffes.



    ... et oui, je vous l'accorde, ce ne sont pas des merveilles !!!!  Ce sont généralement des petites dentelles très "ordinaires" qu'on retrouve au bord des coiffes.

    La dentelle est arrivée dans les costumes traditionnels des campagnes et sur le bord des coiffes très tardivement, grâce à la généralisation de la mécanique (aux environs de 1835) et encore était-elle réservée aux classes les plus aisées.
    Ce n'est que dans la seconde moitié du XIXème siècle qu'on en trouvera aussi sur les coiffes plus modestes ... et pour une raison de coût évidente, on trouvera de la mécanique ou des dentelles à la main mais de moindre qualité.
    En effet, pour continuer à gagner difficilement leur vie, les dentellières vont faire des mètres et des mètres de petites dentelles étroites , vite faites, et souvent mal faites, que les colporteurs iront vendre dans toute la France.

    Alors oui, elles ne sont pas très belles, mais celles que je vous propose aujoud'hui sont au moins faites à la main (on verra un autre jour comment les distinguer de leurs copies mécaniques).

    Pour plus facilement les distinguer, il est préférable d'avoir un troisième oeil.
    Moi, j'ai toujours mon troisième oeil dans mon sac, que je peux sortir à tout moment dès qu'on me met un bout de dentelle sous le nez.

    Mon précieux troisième oeil, c'est ce qu'on appelle un "compte-fils" (*)




    Ne vous fiez pas aux motifs: les dentelles se sont toutes copiées les unes les autres. La dentelle de Lille par exemple était une championne du déguisement pour se faire passer pour de la Malines.
    Interressez vous surtout au réseau "genre tulle" qui relie les motifs, c'est lui qui fait la différence.
    Collons notre troisième oeil sur la dentelle.
    Attention à bien la regarder dans le sens dans lequel elle est travaillée : prenez la bande à la verticale, le pied de la dentelle à gauche.



    1ère chose : les motifs sont-ils cernès d'un fil nettement plus gros (dit "cordon" ou "cordonnet") comme sur la photo  ci contre ?

    Si oui, alors vous pouvez éliminer la Valenciennes, il s'agit de Lille ou de Malines


    2ème chose : comment est fait le réseau ?

    Les fond de la Malines et de la Lille sont formés de petits hexagones.

    Si tous les côtés de ces petits hesagones sont constitués de  deux fils tordus plusieurs fois (généralement 3 torsions), comme sur la photo ci contre, alors il s'agit de dentelle de Lille.













    Si en haut et en bas, vous voyez que les côtés sont aussi faits de deux fils tordus,
    mais que les deux côtés latéraux sont formés de tresses (de 4 fils) alors il s'agit d'un fond de Malines.






















    Quand à la Valenciennes, nous voyons sur la photo ci contre qu'il n'y a pas de gos cordon autour des motifs, et elle se reconnait aussi par son fond entièrement constitué de tresses de 4 fils.



    (voir aussi le troglodyte mignon qui est en Valenciennes :Un Troglodyte Mignon pour fêter le Printemps )

















    (La coiffe en tête de cet article est bordée d'une petite dentelle de Lille, les 3 photos suivantes sont dans l'ordre :  une Lille,  une Malines et  une Valenciennes)

    Bien sûr, la dentelle, c'est comme la grammaire française, c'est plein d'exceptions, de cas particuliers, de formes rares. Mais avec ce bref petit test, vous avez de grandes chances d'avoir juste dans la très grande majorité des cas.

    Autre petit chose à ne pas oublier : le nom d'une dentelle ne fait pas référence à la ville dans laquelle elle a été faite. A Lille, on a fait de la dentelle de Lille, mais aussi de la dentelle de Malines et de la Valenciennes ... et au Puy aussi on a fait de la Valenciennes !

    LIENS : Pour plus de détails sur la Valenciennes, c'est   ici  , et pour la Malines, c'est   là  .


    (*) Vous pouvez trouver des compte fils chez les marchands de matériel de dentelle, mais aussi chez certains opticiens tout simplement
    un autre outil pratique dont je ne connais pas le nom exact :  ce sont des sortes de lampes torches grossissantes utilisées par les philatélistes. Elles ont l'avantage d'éclairer en même temps, par contre elles sont beaucoup plus encombrantes et lourdes, ... et puis comme toujours les piles ont tendance à vous lâcher au plus mauvais moment !


  • Larg : 14 cm
     

    Vous vous demandez sans doute pourquoi je vous montre ce vieux "truc" bleu  tout usé ?

    Et bien parce que dans ma "boîte à p'tits bouts de dentelles", c'est un des plus précieux à mes yeux : il s'agit d'un ancêtre de la dentelle : le Buratto.


    Bien qu'il s'agisse plutôt d'une broderie sur un support pré-existant, le Burrato est généralement classé parmi les dentelles  car il fait partie de son histoire, il en est à l'origine comme le filet, le point coupé, le fil tiré, le fil écarté, etc.


    A première vue, on peut confondre le buratto avec le filet brodé. La technique de broderie est exactement la même :point de reprise ou point de toile(*), les motifs sont les mêmes : enroulements  renaissance comme sur la photo, personnages, scènes de chasses,  animaux réels ou imaginaires,etc, mais le support est différent.

     

    Le buratto est travaillé sur une toile tissée comme la gaze: c'est à dire que les fils de chaines sont tordus 2 à 2 à chaque passages (en inversant les torsions), tenant ainsi les fils de trame écartés et donnant au final une sorte de canevas ajouré.

    Sur la photo (fort grossissement), on voit bien les fils de trame toujours droits.
    Et les fils de chaînes tordus 2 à 2  avec les torsions inversées à chaque passage.


    Cette toile était à l'origine utilitaire (son nom vient du latin Bura = étoffe grossière) et pouvait servir par exemple à égoutter le fromage. Mais elle fut ensuite tissées plus finement, généralement en lin blanc (ou en chanvre) puis brodée en soie polychrome ou simplement en fil de lin  (de la même couleur que la toile, ou d'une couleur contrastée) .




    Même si on trouve au Buratto un aspect grossier aujourd'hui, il faut savoir qu'il fût très apprécié, au point d'avoir l'honneur de décorer le bonnet de Charles Quint , et pas n'importe quel bonnet : le bonnet sur lequel était posé sa couronne !!!
    Vous pourrez admirer ce bonnet en  cliquant  ICI

     

    Le morceau de Buratto photographié au début de cet article est brodé (en blanc) au point de reprise sur un lin bleu, ce qui etait peu courant car le lin prenait mal la couleur, on préférait donc au contraire le blanchir.

    Il présente un motif typique Renaissance ... mais il est cependant impossible de le dater. En effet, très prisé à la fin du XVIème, le Buratto fut peu à peu oublié, puis la technique fut reprise au milieu du XIXème, essentiellement en Sicile et en Sardaigne d'où elle est originaire.

    La production du XIXème et du XXème a copié fidèlement les motifs du XVIème ...  rendant délicates les datations. 

    En plus de l'Italie, le Buratto a aussi été fait au Pérou, propagé par les missionnaires. On peut donc retrouver des motifs sud américains sur certains Buratto.

    Pour voir d'autres exemples de Buratto :
    cliquez    ICI  pour voir 2 rectangles avec un motif de griffon, ou bien ICI   pour voir des paons.

    Vous pouvez aussi voir de nombreuses photos de Buratto dans le livret de Mick Fouriscot "Le secret des dentelles Volume 1", aux éditions Carpentier.



    (*) Voici la différence entre le point de reprise et le point de Toile
    A gauche, le Point de reprise : des points tissés dans un seul sens
    A Droite, le Point de toile : Des points tissées dans les deux sens

    Vous trouverez une illustration très parlante de la différence entre ces deux points avec la photo de deux petites fleurs en filet brodé  (voir lien plus bas)
    J'ai trouvé ces deux petites fleurs sur le magnifique blog d'Adriana sur la dentelle Randa : c'est ainsi qu'on nomme le filet brodé en Argentine.
    Puisque vous serez sur ce blog, profitez en pour le visiter, découvrir le Randa et admirer les réalisations spectaculaires d'Adriana.

                               Lien sur la photo des fleurs en point de reprise et point de toile  
    ICI
                               Lien sur la page d'accueil du blog d'Adriana  ICI







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